Dans le lot des mesures déclinées le 6 octobre 2022 dans le plan gouvernemental de sobriété énergétique, le chauffage à 19 °C est une obligation légale depuis près de 50 ans, jamais appliquée. Quant à l’interdiction des publicités lumineuses la nuit, elle fait depuis dix ans l’objet d’un décret, rarement appliqué
Face à la menace de coupures d’électricité ciblées cet hiver, l’exécutif souhaite baisser notre consommation d’énergie de 10 % sur les deux prochaines années. Télétravail, écogestes, chauffage… Pour accompagner cette feuille de route ambitieuse, le gouvernement a présenté, le 6 octobre dernier, son plan de sobriété énergétique, destiné à préparer un hiver difficile, sans gaz russe et avec de nombreux réacteurs nucléaires à l’arrêt.
Parmi les mesures annoncées, baisser, éteindre et décaler certaines consommations hors des heures de pointe sont les maîtres-mots du plan gouvernemental, déclinés en cinq gestes.
« La règle, c’est de chauffer à 19 degrés ». La cheffe du gouvernement Élisabeth Borne sur BFMTV
« Régler son chauffage à 19 degrés maximum, régler son chauffe-eau à 55 degrés et rester moins longtemps sous la douche, éteindre tous ses appareils lorsqu’ils ne sont pas utilisés, décaler l’utilisation de ces appareils électroniques en dehors des périodes de pointe. » Mais est-ce vraiment assez ? Les écologistes, entre autres, s’inquiètent, estimant qu’il s’agit de « petits pas », mais toujours pas de vrai virage vert.
Le chauffage à 19 °C : une loi jamais appliquée
Bruno Le Maire avait affirmé fin septembre sur France Inter que son ministère n’allumerait pas le chauffage « tant que la température (à l’intérieur) ne sera [it] pas en dessous de 19 degrés », et, surtout, que lui-même porterait désormais des cols roulés.
Au-delà de la moquerie et de la polémique soulevées par les propos du ministre de l’Économie, force est de constater que le gouvernement reste là sur de simples mesures de bon sens, qu’il se contente en outre de recommander, sans vouloir les imposer. Concernant précisément le chauffage réglé sur 19 °C dans les habitations et les bureaux, on est en droit de se montrer sceptique, quand on songe qu’il existe déjà une loi vieille de cinquante ans en la matière, qui n’a jamais été appliquée.
Votée lors du choc pétrolier de 1973, intégrée au code de l’énergie en 2015 et toujours en vigueur
Le texte a été voté sous Valéry Giscard d’Estaing, en 1974, après le choc pétrolier de 1973, dans un train de mesures instaurées afin de réduire la consommation de pétrole dans le pays. Le texte plafonnait alors le chauffage à 20 °C en moyenne « dans les locaux à usage d’habitation, d’enseignement, de bureaux ou recevant du public ». En 1979, un décret réduit cette limite supérieure à 19 °C. Ces dispositions, toujours en vigueur à l’heure actuelle, intègrent le code de l’énergie en 2015, avec quelques exceptions à l’instar des hôpitaux, des crèches ou des maisons de retraite.
Quelles sanctions ?
La loi prévoit même une sanction ! Un non-respect de cette limite constitue en théorie une infraction qui peut entraîner une contravention de cinquième classe, soit une amende de 1 500 euros. Inutile de le préciser : aucune procédure de contrôle n’a jamais été mise en place, pas même dans les bureaux ou habitations collectives où des vérifications pourraient avoir techniquement lieu.
Accompagner les foyers plutôt que sanctionner
« Faire connaître et appliquer » cette loi pour qu’elle sorte (enfin) des oubliettes.
Dans son plan de sobriété énergétique, le gouvernement compte donc « faire connaître et appliquer » cette loi, pour qu’elle sorte (enfin) des oubliettes. Bonne idée. En s’appuyant sur les acteurs des services aux bâtiments et les syndicats de copropriété pour « sensibiliser et faire appliquer le respect des consignes de températures dans les bâtiments dont ils ont la gestion », mais aussi sur les Français et leur sens des responsabilités. Pas question de mettre en place une police des températures et de sanctionner, insiste le cabinet de la ministre de la transition écologique : « l’idée est plutôt d’accompagner les foyers ».
Extinction des publicités lumineuses la nuit : il y a dix ans, déjà un premier décret
Les décrets concernant l’interdiction des publicités lumineuses la nuit, étendant la mesure déjà prise dans plusieurs villes au niveau national, et des portes ouvertes d’un commerce climatisé ou chauffé ont également été publiés le 6 octobre au Journal officiel, alors que le gouvernement français présentait son plan de sobriété énergétique.
S’il est ahurissant que le second décret n’ait pas été pris plus tôt, on peut s’interroger sur le second : le décret sur l’extinction de la publicité lumineuse de 1 heure à 6 heures du matin est en de nombreux points similaire à un précédent pris en… 2012 et rarement appliqué.
Et il ne s’agit là que d’éviter de simples formes de gaspillage, sans remettre en question notre confort quotidien. Que de temps perdu sur le chemin de la sobriété énergétique.
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